Coopérative curatoriale

Texte paru dans le numéro 2 de la revue « Coopérative curatoriale » éditée par le CACN – Centre d’Art Contemporain de Nîmes en décembre 2017.

Il s’agirait donc d’une île. Mouvante et aux contours indéfinis, elle peut aussi bien paraître isolée  qu’ouverte aux horizons. On ne sait en quelle région elle se situe, en réalité on la retrouve partout, nous faisant toujours face. Nous l’observons et souhaitons sans cesse la rejoindre, embarquer dans l’idée d’entrevoir d’autres perspectives. Mais à peine quittons nous notre rive qu’un nouvel îlot fait son apparition. Malgré ses similarités, celui-ci se déploie sous d’autres latitudes et nous emmène plus loin dans notre quête d’idée(aux) sociopolitiques et de découvertes artistiques.

Il nous faut alors circuler d’île en île. Nous déplacer parmi la pluralité de ces points de vue sur le paysage de la pensée critique et artistique et constituer notre propre Isolario. Un répertoire cartographique de théories et de pratiques à partir duquel nous tentons de décrypter ce qui constitue ces terres émergées, ce qui les sépare et les relie à la fois.

Dans son action curatoriale, notre collectif cherche ainsi à se glisser temporairement dans ces interstices reliant l’art à d’autres disciplines. Au risque de fausser nos cartes, de changer d’horizon, nous partons découvrir et expérimenter les imbrications entre différents domaines de pensée, composant progressivement notre territoire d’actions et de questionnements.

À partir de ces interstices nous souhaitons réfléchir à notre rapport au monde, à la production de connaissance et à l’altérité. Arpenter en néophyte les passerelles qui relient les pratiques artistiques contemporaines à d’autres domaines de production du savoir. Anthropologie, sociologie, cartographie, géopolitique, écologie, théorie dé- et postcoloniales, sont autant d’espaces de recherche, d’îles méthodologiques et scientifiques dont les artistes contemporains se saisissent actuellement et sur lesquels nous souhaitons nous concentrer. Profitant alors de ce mouvement, nous jouons de la porosité de ces domaines et de leurs frottements, dans la perspective d’entrevoir quelque chose de leur complexité.

En allant vers une approche critique et sensible centrée sur ces sujets, nous souhaitons ainsi porter un regard sur des réalités plurielles. Ancrés dans une contemporanéité, nos projets d’expositions, de tables rondes et d’entretiens, tentent d’explorer du côté des subjectivités, pour faire entendre d’autres voix, d’autres lectures.

Cette île d’en face, nous voulons la penser comme un laboratoire de recherche en construction engagé à tisser, dénouer puis relier cette cartographie composite. Pour cela, nous faisons le choix d’un processus de travail collégial. Ce fonctionnement horizontal et non hiérarchique permet les remises en question. Ainsi discutés, nos idées, nos projets évoluent et se recomposent constamment, nous permettant alors de rejoindre d’autres territoires encore à découvrir.

Chloé Beulin, Antoine Bertron, Laura Donnet

Pour plus d’informations : Coopérative curatoriale